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Le Noël de mes huit ans

Nous étions en décembre 1960, à cette époque, notre famille comptait sept enfants à la maison, quatre garçons et trois filles; mon frère le plus âgé, avait dix ans et le petit dernier moins d’un an.

Nous allions tous à l’école du rang, située à moins de 500 mètres de la maison; 35 élèves et 7 divisions, de la 1re à la 7e année, tout le monde dans la même salle, une maîtresse d’école; comme de raison, nous apprenions les mathématiques et le français, et beaucoup la religion.

Au début du mois de décembre, ma mère nous avait mentionné qu’avec la période de l’Avent (il s’agit des quatre semaines précédant Noël pendant lesquelles on prépare la fête de Noël et la venue de l’enfant Jésus), il fallait être encore plus obéissant et poli que d’habitude; je n’ai jamais su vraiment pourquoi, sans doute pour plaire au petit Jésus qui allait naître.

Chaque année, vers la mi-décembre, mon père allait couper deux sapins de Noël, un pour mettre dans le salon et l’autre à l’extérieur. Ce n’était pas très compliqué, nous habitions sur une ferme dans le rang 3, dans une paroisse près de Thetford-Mines, donc des sapins, nous en avions plein; un peu plus difficile d’en trouver des très beaux toutefois; ma mère disait toujours à mon père que le sapin du salon devait être le plus beau sapin de la forêt.

L’hiver, mon frère ainé et moi avions pris l’habitude de voyager à l’école en ski; durant la récréation et sur l’heure du midi, nous pouvions donc aller glisser sur une belle pente tout près de l’école. Mon père nous avait fabriqué des skis « maison » et comme bâtons, j’avais trouvé des bouts de branches.

Au cours de l’été, ma mère recevait toujours par la poste le gros catalogue automne hiver de chez Eaton. C’était magnifique, et nous passions des heures à regarder les images en couleur. Au cours de cet automne 1960, j’avais remarqué dans le catalogue une paire de bâtons de ski, en aluminium. C’était les plus beaux bâtons que j’avais vus de ma vie et je me suis mis à en rêver.

Que la vie serait belle si je pouvais avoir ces bâtons de ski en cadeaux pour Noël; leur coût, et je m’en souviens bien, était de 5,75$; pas de taxes dans ce temps-là. Je me suis alors décidé, fin novembre, d’en parler à ma mère et lui mentionner quel beau cadeau ce serait si je pouvais avoir ces bâtons. Ma mère m’a alors répondu que je pouvais oublier cela, que c’était trop cher, que si chacun des 6 autres enfants avait un tel cadeau, ils seraient bien ruinés.

J’ai accepté à regret le raisonnement de ma mère, mais à chaque soir au cours du mois de décembre, je me mettais à rêver à mes bâtons en aluminium gris et à prier puisque nous étions dans la période propice de l’Avant.

 

Le 24 décembre, au cours de la soirée, notre beau sapin était bien à sa place dans notre salon, bien décoré de guirlandes, mais pas de cadeaux. Nous savions tous que les cadeaux étaient bien cachés sous le lit de nos parents; c’était le seul endroit qu’ils pouvaient espérer se rendre jusqu’à Noël sans avoir été déballés; les cadeaux seraient donnés le matin de Noël. Nous étions toutefois intenables et nous ne voulions pas nous coucher. Ma mère nous a alors dit que plus vite on se coucherait, plus vite on se réveillerait le matin de Noël. Cela a marché plus ou moins; mais à 22h00, nous dormions, pas pour avoir écouté ma mère, mais parce que nous étions épuisés.

Le matin de Noël, tout le monde était debout à 7 h et prêts à recevoir les cadeaux. Nous fûmes toutefois contraints d’attendre 8 h, le temps que mon père revienne de faire le train (soigner les animaux).

C’est alors qu’a commencé la distribution; je n’ai aucun souvenir de ce qu’ont reçu mon frère et ma sœur ainés, j’étais bien trop énervé. Quand est venu mon tour, ma mère est allée dans sa chambre à coucher, et elle est revenue avec…des bâtons de ski en aluminium, exactement les mêmes que j’avais vu dans le catalogue Eaton. Ce fut, je crois, un des plus beaux jours de ma vie, et je m’en souviens, 60 années plus tard, comme si cela s’était produit hier. C’était tout simplement merveilleux.

Mes parents ont donné un petit cadeau à chaque enfant, mais je crois que pour ce Noël-là, c’est moi qui ai reçu le plus beau. Puis on nous a donné des bonbons français et des arachides. Au cours de l’avant-midi, mon père est parti pour la messe de Noël, et nous on s’est amusé avec le jeu de dominos familial que nous avions reçu.

Dans l’après-midi, avec mon frère, nous sommes partis en ski, et moi j’avais mes nouveaux bâtons. Avec nos cousins du même âge, qui étaient également nos voisins de ferme, nous nous étions fait une piste de ski dans un champ en pente qui pénétrait dans le boisé. Ce fut une belle journée et un beau temps de Noël et je remercie, encore aujourd’hui, mes parents de m’avoir offert ce si merveilleux présent….

Je vous souhaite un joyeux temps des fêtes!